Empreinte carbone, eau, numérique, financière : voici les 7 empreintes à connaître
Comprendre son impact sur le climat débute par la prise de conscience de son mode de vie sur la planète. Pour cela, quoi de mieux que de connaître les différentes empreintes qu’il existe. La plus connue est bien sûr l’empreinte carbone, mais elle n’est pas la seule. Il serait en effet restreint de se cantonner à cette mesure, car ce qui est bon pour le climat n’est pas forcément bon pour l’eau, la biodiversité, la justice sociale, etc. Il est ainsi important d’avoir une vision la plus systémique et englobante possible pour comprendre son impact. Voici donc un petit tour d’horizon des différentes empreintes.
L’empreinte carbone
Elle représente la quantité totale de gaz à effet de serre induite par les activités, productions et consommations des individus que nous sommes. En bref, c’est un résumé de l’impact de notre mode de vie personnel sur la planète. L’empreinte carbone est exprimée en CO2 équivalent, ou CO2e. C’est un indicateur qui permet de mettre tous les gaz à effet de serre (méthane, protoxyde d’azote, gaz fluorés) sur le même plan et de pouvoir donc les comparer entre eux. Cette empreinte prend en compte la fabrication, l’usage et la fin de vie. À savoir qu’il existe des disparités selon les pays : un individu en France a une empreinte carbone de 10 tonnes, alors qu’un Américain est autour de 18 tonnes, tandis qu’un Indien est à moins de 2 tonnes (source). Pour calculer votre empreinte carbone, vous pouvez le faire en moins de 10 minutes sur le site Nos Gestes Climat de l’ADEME, qui vous fournira un résultat mais également des recommandations pour agir. Enfin, pour comprendre les ordres de grandeur, le site impactCO2 est très bien fait pour obtenir des comparaisons entre les différents mode de transport, chauffage, alimentation, électroménager, numérique, etc. Le Monde a également sorti un quiz interactif sur les ordres de grandeur : par exemple, combien de CO2e est émis si on regarde chaque jour 1h30 de vidéo en streaming pendant un an ? Ou encore, combien de CO2e émet un jet transportant 9 personnes pendant 1h ?
L’empreinte hydrique
L’empreinte hydrique est le volume total d’eau « virtuelle » utilisée pour produire un produit ou un service. Pourquoi virtuelle ? Car il y a une prise en compte de toutes les externalités : par exemple, les pesticides peuvent perturber localement les cycles de l’eau. Pour comprendre l’empreinte hydrique, il est vital d’aller au-delà de la simple consommation d’eau. En effet, si nous consommons 149 litres d’eau potable par jour (source, nous utilisons en réalité 4 893 litres d’eau par personne et par jour (source) ! Pourquoi ? La grande majorité de notre empreinte hydrique vient de notre consommation de produits (alimentaires, achats vestimentaires par exemple) et non des litres que nous buvons ou des douches que nous prenons. Et notamment, selon l’hydrologue Charlène Descollonges autrice de “L’eau - fake or not” : “En France, 85 % de notre empreinte est due à l’alimentation. L’agriculture dépend énormément de l’eau verte et l’on puise beaucoup dans l’humidité des sols.” (source : Reporterre)
En effet, il existe 3 types d’empreinte eau :
- Eau verte : eau de pluie stockée dans le sol, qui est incorporée dans les végétaux, transpirée ou évaporée.
- Eau bleue : eau captée pour les usages domestiques et agricoles. Elle est aussi définie comme l’eau douce de surface ou souterraine (lacs, rivières, etc.).
- Eau grise : eau polluée par les processus de production.
Par exemple, pour produire 1kg de fromage, il faut en réalité… 5060 litres d’eau ! Un oeuf demande 200 litres d’eau. Un t-shirt en coton a besoin de 2 500 litres d’eau pour sa fabrication (source : Water Footprint Network). Ce sont donc les eaux bleues et grises qui comptent pour la plus grande empreinte. Pour calculer votre empreinte hydrique, rendez-vous sur le site (en anglais) de Water Footprint Network.La plateforme Nos Gestes Climat travaille sur une empreinte eau qui devrait sortir fin 2024.
L’empreinte financière
L’argent de nos comptes en banque est utilisé pour des financements et investissements qui ne sont pas toujours « verts », notamment lorsque cela contribue au développement d’activités dans les énergies fossiles. L’empreinte financière pèse souvent plus lourd que notre empreinte carbone, mais elle est invisible. Par exemple, saviez-vous que 2 200€ qui dorment sur un compte en banque polluent autant qu’un aller Paris-New York (source) ? Oxfam a travaillé sur [un rapport](L’empreinte carbone des grandes banques françaises représente près de 8 fois les émissions de gaz à effet de serre de la France entière.) pour comprendre comment les banques aggravaient le climat, et voici un chiffre édifiant : “L’empreinte carbone des grandes banques françaises représente près de 8 fois les émissions de gaz à effet de serre de la France entière.” Pour calculer votre empreinte financière, vous pouvez utiliser l’application Rift. Pour faire la démarche de changer de banque, ce site compare les politiques climatiques des banques françaises. Enfin, sachez que la mobilité bancaire oblige les banques à faire la démarche de changement de banque pour vous, une fois votre compte ouvert. Pour aller plus loin, retrouvez l'article de Nouvelle Empreinte : "On décrypte la finance durable"
L’empreinte matérielle
L’empreinte matérielle, plus connue sous le nom de “Material Footprint”, représente la quantité totale de matières premières extraites pour satisfaire les demandes de la consommation finale. Il existe de nombreuses inégalités en fonction des pays :
- Dans les pays à faible revenu, 2 tonnes de matériaux sont nécessaires par personne et par an
- Dans les pays à revenu intermédiaire, 17 tonnes de matériaux sont nécessaires par personne et par an
- Dans les pays à revenu élevé, 27 tonnes de matériaux sont nécessaires par personne et par an
Les matières sont définies comme étant les minéraux non-métalliques (granit, phosphore), la biomasse, les combustibles fossiles (pétrole, charbon, gaz), et les minerais métalliques. Par exemple, pour produire un smartphone de 120 grammes, il faut en moyenne 70kg de matières premières, dont 50% de métaux (cuivre, fer, aluminum, cobalt…), 30% de matières plastiques et synthétiques, et 20% de verre et céramique. L’empreinte matérielle moyenne d’un Français était de 13 tonnes par habitant en 2022 (source). Il n’existe pas encore de calculateur pour l’empreinte matérielle, mais pour aller plus loin, je te propose de réfléchir à tous les biens que tu possèdes qui nécessitent des matériaux (électroménager, ordinateurs, voitures) et d’imaginer comment tu pourrais réduire cette consommation.
L’empreinte numérique
L’empreinte numérique est en réalité un mix entre différents indicateurs pour évaluer l’impact du numérique sur l’environnement :
- L’empreinte carbone
- L’empreinte hydrique
- L’empreinte matérielle
- La consommation électrique
- L’énergie utilisée tout au long du cycle de vie d’un équipement (fabrication, utilisation, fin de vie)
Par exemple, un ordinateur portable nécessite 240kg de combustible fossile, 22kg de produits chimiques, 1,5 tonne d’eau et émet 170kg de CO2e à la fabrication. La part du numérique dans l’empreinte carbone moyenne d’un Français est entre 3% à 10%, selon les études (source). Pour faire votre propre bilan, rendez-vous sur le site Nos Gestes Climat. Cependant, cette empreinte est en augmentation importante. La part du numérique dans les émissions globales augmente d’environ 6% par an au niveau mondial, et 2 à 4% par an en France (source). Pour aller plus loin, je vous recommande vivement la Fresque du numérique qui est un très bon atelier de 3h pour comprendre les enjeux et impacts. Vous pouvez aussi découvrir l’outil impactCO2 pour comprendre les usages du numérique ou des appareils numériques. Enfin, il existe ce comparateur un peu plus technique mais très complet pour vraiment comprendre l’impact des appareils, serveurs, et du Cloud. Pour approfondir vos connaissances sur l'empreinte environnementale du numérique, découvrez le MOOC de l'INRIA sur les impacts du numérique.
L’empreinte écologique
Elle mesure la quantité de surface terrestre bioproductive nécessaire pour produire les biens et services que nous consommons, et absorber nos déchets. Une zone bioproductive est définie comme une zone pouvant produire une offre continue en ressources renouvelables, tout en absorbant les déchets liés à notre consommation. Ces zones peuvent être des terres cultivées, des pâturages, forêts, zones de pêche, et terrains bâtis. Si l’empreinte écologique d’une zone dépasse sa biocapacité, alors elle est en “déficit” écologique : c’est le cas de la France et de la plupart des pays développés.
Par exemple, si chacun avait le même mode de vie qu’un Américain moyen (où il y a besoin de 10 hectares de terres bioproductive), la population mondiale aurait besoin de 5 planètes afin de se nourrir, s’habiller et s’héberger chacun. L’évènement le plus connu basé sur l’empreinte écologique est le jour de dépassement de la terre, qui en 2024 est le 1er août : c’est-à-dire qu’après cette date, l’humanité a consommé toutes les ressources de la planète et vit à crédit. Pour alléger notre empreinte écologique, nous pouvons jouer sur 2 facteurs : d’un côté, réduire notre empreinte carbone, et de l’autre augmenter la biocapacité d’une zone (par exemple, reforester). Pour calculer votre empreinte écologique, connaître votre jour personnel de dépassement et le nombre de planètes qu’il vous faudrait, il existe le calculateur du Global Footprint Network.
L’empreinte biodiversité
Elle permet de quantifier l’impact des activités humaines sur l’ensemble des êtres vivants et leurs écosystèmes.
Peu de monde en parle, et pourtant la Caisse des Dépôts et Consignation (programme biodiversité) a lancé en 2020 le « Global Biodiversity Score » pour aider les collectivités et entreprises à calculer leur impact.
Selon leur site, ce score permet “d’établir un lien entre activités économiques et principales pressions sur la biodiversité”. Cette empreinte est calculée en deux temps :
- Établir le lien l’activité économique d’une entité et la pression générée sur la biodiversité ;
- Quantifier l’impact de ces pressions sur la biodiversité.
Cette méthodologie permet de comprendre les pressions sur les 5 facteurs d’extinction de la biodiversité : changement d’usage des sols, surexploitation des ressources, changement climatique, pollution et espèce invasives.
Il existe même le Club B4B+ (Club des entreprises et institutions financières pour une biodiversité positive) qui co-construit et expérimente ce Global Biodiversity Score.
Ce calcul existe pour le moment uniquement pour les entreprises, les institutions financières et les collectivités.
Ces différentes empreintes aident à appréhender l’impact de notre mode de vie sur les 9 limites planétaires. Certes, il n’existe pas encore de calculateur pour toutes les limites planétaires, mais de nombreux sont en cours de développement et les existants nous informent déjà beaucoup ! Alors n’hésite pas à les utiliser, et à les diffuser au maximum.