Finance durable
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On décrypte la finance durable

Publié le
26 avril 2024
Finance Durable, de nouveaux modèles
Auteur(s)
Marion Gaulin
Marion Gaulin
Fondatrice du média Nouvelle Empreinte
Finance Durable, de nouveaux modèles
Finance et écologie : quel rapport ?

Saviez-vous que votre argent menait une double vie ? Contrairement à ce qu’on pourrait penser, notre argent placé à la banque ne dort pas paisiblement dans un coffre-fort en attendant qu’on l'utilise. En réalité, il bosse en secret.

La banque va donc injecter notre argent dans des financements de projets ou des prêts aux entreprises. 

On ne vous a pas demandé votre avis ? C’est normal, ce système n’est pas très transparent, voire très opaque. Ce que l’on sait, c’est que ces projets financés gravitent souvent autour des industries polluantes telles que les énergies fossiles, les pesticides, la déforestation, l’élevage intensif, etc. Mais alors, qui sont ces entreprises ? Ont-elles un droit à polluer sans limite ? 

Petite cours de rattrapage en droit : 

En février 2017, la France adopte une loi qui introduit « le devoir de vigilance » dans le droit. Ce fondement oblige certaines multinationales françaises à identifier et prévenir les risques sociaux et environnementaux causés par leurs propres activités et celles de leurs filiales, en France comme à l’étranger. Des ONG ont donc attaqué en justice plusieurs multinationales pour leur manquement à leur devoir de vigilance : 

En 2023, c’est une première : une banque est attaquée sur son devoir de vigilance. Trois ONG (Oxfam, Les Amis de la Terre et Notre Affaire à tous) assignent en justice BNP Paribas devant le tribunal judiciaire de Paris pour son soutien aux énergies fossiles. 

« C’est la première fois qu’une banque est attaquée sur le fondement du devoir de vigilance, mais c’est aussi le premier contentieux climatique au monde visant une banque commerciale » - Lorette Philippot, chargée de campagne Finance Privée aux Amis de la Terre.

BNP Paribas n’a pas été ciblée par hasard. En effet, entre 2016 et 2021, elle a été : 

  • la première banque en Europe et la cinquième au niveau mondial à financer le développement des énergies fossiles.
  • le premier financeur mondial des huit principaux acteurs du pétrole et du gaz (TotalEnergies, Chevron, Exxon Mobil, Shell, etc.) qui continuent à développer de nouveaux projets fossiles. A titre d’exemple, TotalEnergies aurait obtenu plus de 5 milliards de dollars de financements auprès de BNP Paribas. 

Au rythme actuel, les grandes banques françaises nous emmènent vers un réchauffement à +4°C d’ici à 2100, bien loin de l’objectif de 1,5°C fixé lors des Accords de Paris.

oxfamfrance.org

En 2018, selon une étude d’Oxfam France et Les Amis de la Terre, les principales banques françaises (BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale, BPCE) ont généré 8 fois plus d’émissions de gaz à effet de serre que la France entière, via leurs financements. Ce même rapport a également révélé que 70% de leurs financements énergétiques étaient orientés vers les énergies fossiles (charbon, pétrole et gaz) contre seulement 20% vers les énergies renouvelables. Vous l’aurez compris, nous donnons ainsi carte blanche - à notre insu - à de gros acteurs qui financent un monde qui atteint ses limites.

Changer de regard sur le mot “argent” ?

Parler d’argent dans un contexte écologique est parfois mal appréhendé. Or, la transition écologique a besoin de financements pour devenir la norme. Changer de regard sur le mot “argent”, qu’est-ce que ça signifie ? Ne pensons pas l’argent comme le diable mais plutôt comme un outil. Aujourd’hui, on l’utilise pour faire fonctionner une économie qui creuse les inégalités et vide la terre de ses ressources naturelles. Il est urgent de rediriger les flux, et donc l’outil “argent”, vers une transition écologique durable. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les financements existent. Nul besoin de vider nos poches pour financer la transition écologique, l’argent doit changer de système. Voyons cela comme une route, nous devons changer de direction au plus vite afin de ne pas finir dans le mur. On vous laisse deviner quelle route y mène ?

Comme nous le disions précédemment, le système financier actuel est opaque et ne nous permet pas de savoir ce que finance notre propre argent. Or, la finance durable permet de reprendre le pouvoir sur son argent grâce à une plus grande transparence sur les placements. C’est d’ailleurs ce que met en avant les banques comme Helios ou Green-Got ou encore la solution d’épargne Goodvest.

Finance durable, verte, responsable, solidaire… Quelles différences ? 

En s’intéressant à ce sujet, vous pourrez entendre parler de finance durable, finance verte, finance responsable ou encore de finance solidaire. Ces mots veulent-ils dire la même chose ? En réalité, il y a de sensibles différences. Faisons le point afin de savoir réellement de quoi on parle :

  • La Finance durable englobe l’ensemble des activités financières visant à améliorer l'intérêt de la collectivité sur le long-terme. Au sein de la finance durable, la Banque de France distingue trois pratiques différentes : la finance verte, la finance solidaire et la finance responsable.
  • La Finance verte correspond aux opérations financières en faveur du développement durable en favorisant la transition énergétique et la lutte contre le réchauffement climatique.
    Exemples : gestion de l'eau, des déchets, efficacité énergétique, mobilité douce, énergie renouvelable, etc.
  • La Finance solidaire soutient des projets qui ne trouveraient pas de financement dans les circuits financiers classiques car insuffisamment rentables. La finance solidaire vise donc à faciliter le financement de projets sociaux pour lutter contre les inégalités, l'exclusion et améliorer la cohésion sociale.
    Exemples : réinsertion, lutte contre le chômage, logement, etc.
  • La Finance responsable incite les entreprises à prendre en compte des critères extra-financiers (en plus de sa performance purement financière), en intégrant des critères ESG* dans les processus d'investissement. 


*Les critères ESG, quésaco ?
On parle des critères Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG) pour analyser et évaluer la prise en compte du développement durable et des enjeux long-terme dans la stratégie des entreprises.
Le critère Environnement prend en compte les émissions de gaz à effet de serre, le recyclage des déchets, la biodiversité ou encore la prévention des potentielles pollutions.
Le critère Social tient compte de la qualité du dialogue social au sein des entreprises, l’emploi des personnes en situation de handicap ou encore la formation des salariés. 
Le critère de Gouvernance s’assure de la transparence de la rémunération des dirigeants d’entreprise, de la lutte contre la corruption ou encore de la féminisation des conseils d’administration.

Des labels pour la finance ? 

Comment savoir si des placements sont réellement durables ou s’il ne s’agit pas de greenwashing ? Le secteur de la finance durable a donc ses propres labels afin de garantir la qualité “engagée” des placements.

Quand on parle de finance responsable, on parle donc d’investissement socialement responsable (ISR). Créé par le ministère des Finances, le label ISR permet d'identifier les placements responsables et durables. Ainsi, il garantit aux investisseurs que le fonds a développé une méthodologie d'évaluation sur la base des critères ESG, et qu'il les intègre dans sa politique d'investissement. Mais le label ISR doit aller plus loin. En effet, il a pu bénéficier de son faible niveau d’exigences pour se diffuser assez rapidement. En 2024, le label ISR renforce donc ses exigences et ses ambitions en matière de lutte contre le changement climatique. Depuis le 1er mars 2024 : 

  • l’impact climatique devient un principe clef du label afin de mieux répondre aux attentes des épargnants et à l’urgence climatique.
  • excluront des entreprises qui “exploitent du charbon ou des hydrocarbures non conventionnels et lancent de nouveaux projets d’exploration, d’exploitation, de raffinage d’hydrocarbures (pétrole et gaz)”.

Le label Greenfin, créé par le ministère de la Transition écologique et solidaire cette fois-ci, est bien plus exigeant et sélectif que l’ISR. Il garantit des placements financiers qui contribuent à la transition énergétique et écologique en excluant les fonds qui investissent dans des entreprises opérant dans le secteur du nucléaire et des énergies fossiles. Ce label est un réel gage de crédibilité et de transparence.

Le label Finansol quant à lui, concerne exclusivement les produits d'épargne solidaire, c'est-à-dire qui financent des activités telles que la lutte contre l'exclusion, la réinsertion, la cohésion sociale, l’aide au logement, la solidarité internationale, etc. Comme son nom l’indique, il s’agit davantage de placement en lien avec la solidarité plutôt que de performance financière. 

Vous l'aurez compris, la finance représente un puissant levier pour aborder la transformation des enjeux environnementaux et sociaux. Mais pour que ça fonctionne, il faut que les professionnels y soient formés. C'est pourquoi, à la Regen School, tous les programmes ont été repensés pour les préparer au mieux à rediriger les capitaux vers des solutions à impact !

Après cette introduction à la finance durable, vous voilà au point pour mieux comprendre ce sujet !